Choix de cinquième tour du Canadien en 2012, Charles Hudon a passé huit saisons dans l’organisation avant de quitter pour la Suisse, à l’été 2020.
Après une saison à Lausanne, il a signé un contrat d’un an à deux volets avec le Lightning de Tampa Bay, avant de faire de même avec l’Avalanche du Colorado.
Puis, l’été dernier, le Reign d’Ontario, le club-école des Kings de Los Angeles, lui a consenti une entente de deux ans valide uniquement pour la Ligue américaine.
Trois ans et demi plus tard, Hudon, maintenant âgé de 29 ans, revient sur ses années à Montréal et les saisons qui ont suivi, dans notre populaire segment « Au coeur de l’athlète »:
« En 2020, j’ai décidé de partir en Suisse pour le côté familial et le côté monétaire. Quand je suis parti, on était en pleine COVID et les chances que la Ligue nationale recommence étaient plutôt minces. Je ne pouvais pas rester à la maison à ne rien faire. Il fallait que je me revire de bord.
Quand mon agent m’a dit que si j’allais en Suisse, le Canadien n’allait pas pouvoir retenir mes droits via une offre qualificative et que j’allais pouvoir devenir joueur autonome sans compensation à l’été 2021, j’ai tout de suite sauté sur l’occasion. Je voulais aussi vivre l’expérience de l’Europe et on a adoré nos moments à Lausanne. Surtout que mon fils est né là.
L’ambiance à Lausanne, dans l’aréna et dans la ville, est vraiment incroyable. On a appris plein de choses sur la Suisse et l’Europe et mes filles (aujourd’hui âgées de huit et cinq ans) ont créé des souvenirs incroyables. On regarde souvent des photos de notre temps là-bas, pour se souvenir à quel point c’était magnifique et comment on était bien. On a vraiment trippé. Je ne suis pas encore prêt à retourner en Europe, mais c’est sûr que c’est une option pour finir ma carrière.
En Suisse, tu es toujours en congé le dimanche et tu as ici et là une semaine de congé. Tu peux alors te reposer ou voyager en famille. Tu te promènes aussi beaucoup moins pour tes matchs. Toutes les villes sont magnifiques, tu te déplaces en autobus et tu reviens presque toujours dormir à la maison. Le lendemain, tu te réveilles en famille, c’est un gros plus.
Mais malgré tout ça, dans ma tête, ça a toujours été clair que j’allais à Lausanne pour mieux revenir dans la Ligue nationale. Alors, quand j’ai reçu l’appel de Tampa Bay, à l’été 2021, et que Mathieu Darche — que je connaissais en raison de mes premières années à Montréal — m’a dit que le Lightning croyait que je pouvais encore jouer en haut, je suis revenu facilement.
J’ai toutefois été très déçu de ne pas jouer du tout dans la LNH cette saison-là. Après tout, j’avais quitté la Suisse pour ça, alors que j’avais une offre de contrat sur la table là-bas. Mais bon, c’est ça la LNH, c’est une business. J’ai toutefois eu une bonne année à Syracuse et ce n’est vraiment pas loin du Québec, alors c’était bien de pouvoir voir plus souvent mes parents et mes amis.

Est ensuite venue l’offre du Colorado. J’étais content quand Joe Sakic a appelé, car je sentais que j’avais fait le tour du jardin dans l’Est. Je voulais essayer l’Ouest de la Ligue américaine, voir c’était quoi. On est vraiment tombé en amour avec le Colorado. Je ne joue plus là, mais c’est vraiment un endroit où on aimerait aller vivre une fois ma carrière terminée.
Les Eagles jouent à 45 minutes de Denver, dans une ville appelée Loveland. Notre aréna et notre complexe d’entraînement sont là. Mais quand on était en congé l’été, on allait parfois voir jouer les Rockies, au baseball. Les Broncos, au football, ou les Nuggets, au basket, c’était plus difficile, car ils jouent pas mal durant notre saison. On aimait aussi faire des randonnées. Les montagnes et les paysages là-bas sont incroyables!
Cette année-là, j’ai pu jouer neuf matchs dans la LNH. Quand j’ai reçu l’appel m’annonçant que j’étais rappelé, je me suis dit: enfin! Généralement, les gars rappelés jouent sept-huit minutes par match. Mais à mon premier match, Nate [Nathan MacKinnon] s’est blessé et on m’a demandé de le remplacer avec Mikko [Rantanen]. J’ai joué 18 minutes et ça a bien été. Je me sentais bien sur la glace.
En fait, ça faisait plusieurs années que je ne n’étais pas senti aussi bien. Je n’ai pas fait de points, mais j’ai quand même démontré que j’étais encore capable de jouer dans cette ligue-là. Après quatre matchs, les blessés sont revenus et mon temps de glace a diminué. Je suis néanmoins resté positif et j’étais content de mon expérience.
Je ne sais pas quel aurait été mon cheminement s’il n’y avait pas eu de COVID, mais quand j’ai été rappelé par l’Avalanche, j’étais juste fier de toutes les décisions que j’avais prises au fil des années: quitter le Canadien, aller en Suisse, revenir à Syracuse, choisir le Colorado… tout ce que j’ai fait, c’était pour moi, mais aussi ma famille. D’avoir eu des matchs avec l’Avalanche a été un gros bonus.
Mon but était de rester au Colorado, mais avec le changement d’entraîneur, il a voulu en quelque sorte changer l’air de l’équipe. J’ai donc dû quitter. Rendu à ce stade de ma carrière, je voulais signer deux ans, j’étais tanné de bouger la famille. Deux équipes me l’offraient, dont le Reign d’Ontario.

Mon contrat est valide uniquement pour la Ligue américaine. Donc, si les Kings veulent me rappeler, ils doivent me faire signer un contrat. C’est sûr que j’aimerais ça que ça arrive, mais présentement, je me concentre sur mes choses à Ontario. Je me sens bien et j’essaie d’être un leader pour les jeunes. Les coachs me donnent beaucoup de responsabilités et j’aime ça. Tellement que ça me fait me demander ce que je veux faire après ma carrière. Peut-être coach, qui sait?
Ici, on s’entraîne à l’aréna de pratique des Kings et pas mal tous les joueurs du Reign habitent à côté de la plage, dans le coin de Manhattan Beach et Hermosa Beach. J’habite à cinq minutes de Phil Danault, on se voit souvent. On est donc à une heure d’Ontario et on doit faire la route à chaque match. Et ça peut devenir deux heures avec le trafic! Mais le Reign met à notre disposition des chambres d’hôtel si on veut aller faire une sieste avant les matchs. Vraiment, on est bien ici. On est en Californie!

Trois ans et demi plus tard, quand je repense à mes années à Montréal, je dirais que j’ai eu beaucoup de hauts et de bas que je n’ai pas été capable de contrôler. C’est ce qui était le plus déchirant et difficile à avaler. Parfois, je ne jouais pas et je ne savais même pas pourquoi.
Je vais garder beaucoup de souvenirs positifs de Montréal. Jouer à la maison. Voir mes parents souvent dans les estrades. Tu mets mon nom dans Google et ce qui sort en premier, c’est moi avec le Canadien. Je vais toujours avoir le CH tatoué sur le coeur.
Mais il y a aussi eu des moments où je n’avais même plus envie d’aller à l’aréna. C’était difficile. C’était difficile aussi à la maison, car le négatif amène du négatif. Oui, il y a des moments que j’essaie d’oublier, mais je dirais que le Canadien fera toujours partie de moi. Je n’ai pas grand-chose d’autre à dire mis à part que je ne pouvais pas contrôler certaines choses qui me sont arrivées.
J’aimerais en dire plus, mais ce sera pour après ma carrière, quand mes propos ne pourront pas affecter la suite des choses pour moi. Je veux juste dire que je suis fier de ce que j’ai fait à Montréal.
Je suis très fier que ma plus vieille ait pu me voir jouer et qu’elle s’en souvienne encore. Il y a des matchs où j’avais peut-être une vingtaine de parents et amis dans les estrades. C’était spécial. Mes deux premiers buts à Ottawa, mon premier match et mon premier but au Centre Bell… toutes les premières, ça m’a marqué.
Les partisans du Canadien vont toujours être importants pour moi. Il va toujours y avoir des gens qui vont te voir en héros une semaine et qui vont vouloir t’échanger la semaine d’après. C’est ça, Montréal.
C’est sûr que je m’ennuie de la ville et de la passion des fans quand les choses vont bien, mais vu que ça n’a pas fini sur une bonne note, j’essaie de moins y penser.
Mon passage à Montréal et les partisans vont toujours rester dans mon coeur. Je connais encore beaucoup de personnes dans l’équipe — dont HP [Harvey-Pinard], qui vient de ma région — et je leur souhaite du succès.
Le hockey, c’est une business. Mais j’espère que les gens vont se souvenir de moi comme d’un Québécois qui a montré de bonnes choses et qui a toujours tout donné avec le Canadien. »
Charles